top of page

Le regret d'être mère

  • Photo du rédacteur: Johanna Zazoun
    Johanna Zazoun
  • 21 nov. 2022
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 24 nov. 2022


ree

Ces dernières années, le sujet du regret de la maternité est beaucoup revenu sur le tapis, que ce soit à travers une de mes lectures ou bien des posts sur Facebook. J’en parle régulièrement avec mon mari également car le tabou qui existe à l’heure actuelle est désolant. Un tabou est quelque chose de malséant à aborder à cause de conventions sociales, culturelles voire religieuses. Pour quelqu’un comme moi, une personne pour qui être authentique est aussi vital que le fait de respirer, c’est assez dur à comprendre.


Quand certaines personnes osent aborder le sujet, et encore souvent de manière anonyme, les commentaires peuvent donner envie de vomir. Les phrases écrites sont des concentrés de préjugés, de sacro-sainte vérité qu’on nous assène depuis la naissance, de jugements et j’en passe. Certaines voix se font entendre pour tenter de mettre des mots sur leur mauvaise expérience de la maternité tandis que d'autres clament haut et fort qu'elles ne veulent jamais mettre d'enfants au monde, le tout donne ensuite le droit à un florilège de jugements. Pour les personnes se permettant de dire à d'autres qu'elles vont regretter de ne pas avoir d'enfant j'aimerais leur faire passer un message. Non, la maternité n'est pas une fin en soi, non être femme ne veut pas dire vouloir devenir mère, oui une femme peut savoir au plus profond d'elle même qu'elle ne souhaite pas avoir d'enfants et non elle n'a pas à se sentir coupable de cela. La personne la plus importante au monde n'est ni un enfant, ni un conjoint, ni même un parent c'est soi-même. Dans une société où on nous dicte qu'il faut aimer le sexe, aimer la famille, être épanoui dans sa vie professionnelle, faire du sport, avoir des amis.. je trouve qu'il faut beaucoup de courage pour identifier sa source de bonheur personnel et savoir ce qui nous ferait ou non du bien.


Quand aux personnes osant émettre un jugement meurtrier sur ces femmes regrettant d'être devenues mères j'aimerais leur rappeler qu'à la même situation on a le droit à deux opinions opposées! Alors qu'on jette si facilement des pierres aux femme, un homme peut (et ça, même après la naissance) se lever et partir car il se rend compte qu'il n'est pas fait pour ça, par contre une femme non. L’homme on va finir par pardonner ou à défaut l’oublier rapidement. On va couvrir son absence par des “après tout vaut mieux qu’il ne soit pas là si c’est pour être un mauvais père” ou des “ils sont bien mieux sans lui”. Par contre pour la femme c’est un péché mortel que de partir. Ils sont nombreux à la condamner. A partir du moment où une femme tombe enceinte elle n'a plus le droit de regretter ou de vouloir s'enfuir en courant car la maternité est un cauchemar pour elle. Elle est faite pour porter la vie car biologiquement son corps est fait pour mais on ne lui apprend pas à se connaître suffisamment et se poser les bonnes questions avant de lui inculquer qu'un jour elle aura des enfants. C'est triste et voilà un tabou qui ne devrait même pas en être un.


On devrait pouvoir dire librement autour d'un café "non je ne veux pas d'enfants" ou "je regrette de ne pas m'être posée plus de questions avant de tomber enceinte" sans avoir peur du jugement des autres. Et je dis ça en tant que mère de 4 enfants qui non ne regrette pas la maternité mais oui est suffisamment sage pour comprendre que chaque personne est différente et trouvera son bonheur différemment de son voisin. La question n'est même pas de pourquoi ou comment une femme est devenue maman mais pourquoi on ne peut pas écouter la parole de l'Autre de manière bienveillante ? Pourquoi faire d'un sujet, déjà pas aisé à aborder car cela touche à l'intimité et l'identité les plus profondes de la femme, un sujet de débat et jugement ? J'ai le droit de clamer haut et fort que je n'aime pas la sodomie ou que mon amour pour mon conjoint a disparu mais pas que je regrette d'être devenue mère ? Car sinon même mon amie pourtant proche va me regarder avec de gros yeux et je vais sentir de la désapprobation et du jugement dans sa voix alors que j'ai le courage de pointer un problème qui m'empêche de dormir ? Et je ne parle pas des millions de gens derrière leurs écrans qui s'empressent de crier au sacrilège et se défendent en osant dire "il fallait y penser avant".


Est ce si difficile d’être dans l’écoute et non le jugement? Et pourquoi tant de gens mélangent le regret de maternité avec l’amour pour son enfant? Cela n’a rien à voir. On peut aimer son enfant mais détester le fait d’être maman, d’être devenu quelqu’un qu’on ne reconnaît pas. Le corps d’une femme change lors d’une grossesse tout le monde le sait mais savez-vous que le cerveau également? Dans les zones couvrant les interactions sociales des changements ont été notés selon une étude publiée en décembre 2016 par Nature Neuroscience “Pregnancy leads to long-lasting changes in human brain structure”. Ce qui veut dire que notre perception, notre interprétation des désirs, des intentions, des émotions et de l’humeur des autres et de nous même changent. Alors, comment oser dire à quelqu’un qu’il fallait y réfléchir avant? Comment réfléchir et anticiper un événement qu’on n’a jamais vécu auparavant? On ne parle pas ici de quelqu’un qui a le vertige et qui regrette d’avoir tenté le saut à l’élastique.


Maintenant si on oublie les faux semblants une minute on sera tous d’accord pour s’accorder à dire que nous vivons dans une société et un modèle familial qui ne nous incite pas "à y penser avant", qui ne nous éduquent pas et ne nous sensibilisent pas au fait qu'il faille apprendre à se connaître, comprendre la clé de son bonheur et épanouissement personnel avant de réfléchir à comment construire sa vie. On commet tous des erreurs dans la vie, que ce soit un mauvais conjoint, une mauvaise orientation professionnelle ou même fonder une famille. Les conséquences peuvent être plus ou moins dramatiques mais plutôt que de fermer les yeux et de pointer du doigt les gens qui admettent leurs erreurs et demandent à être écoutés on devrait plutôt les inviter autour d'un café et tendre une oreille bienveillante.

Chaque génération tend à s'améliorer et notre génération de femmes tentent de libérer la parole et demandent à pouvoir s'exprimer librement. Qu'on donne la vie ou non chacun a le droit de pouvoir ressentir n'importe quel sentiment et a le droit de pouvoir l'exprimer librement sans crainte d'être jugé.


Commentaires


© 2023 by The Book Lover. Proudly created with Wix.com

bottom of page