L'écriture comme catharsis
- Johanna Zazoun
- 25 sept. 2020
- 3 min de lecture
Bonjour les lecteurs
Aujourd'hui je vais vous parler d'un projet que j'ai mené à bien dernièrement, un projet qui me tenait hautement à cœur et sur lequel j'ai travaillé des centaines d'heures.
Pour ceux (mais ils doivent être rares) qui ne le savent pas ma mère est morte le lundi 21 janvier 2019. De quoi? Je ne sais toujours pas. Pourtant j'ai lu le dossier médical, je me suis assise avec la directrice adjointe de l'hôpital et le responsable du département soins intensifs, j'y suis allée accompagnée donc ce n'est même pas un problème d'hébreu. Juste, jusqu'à présent je ne comprends pas et je serais incapable de dire pourquoi ma mère qui venait à peine trois semaines plus tôt de fêter ses 60 ans est morte. Le choc a été terrible. Jusqu'à présent je n'arrive pas à le croire. Il me semble inconcevable que ma mère qui incarnait la Vie, la joie, le bonheur puisse être enterrée six pieds sous terre.
Quelques temps après sa mort j'ai lancé un appel sur Facebook, j'ai demandé à ce qu'on m'envoie des histoires, des anecdotes, des souvenirs de ma mère. J'avais l'impression que ça m'aiderait à la garder encore un peu auprès de moi, que ça m'aiderait également à la connaître un peu plus. J'ai reçu quelques retours, certains m'ont fait sourire, d'autres m'ont appris des choses sur elle. Je les ai gardé de côté. Puis j'ai commencé à écrire des souvenirs qui remontaient à la surface, j'ai écrit certaines de ses expressions dans l'idée de ne pas les oublier, de raconter ma mère à mes enfants afin qu'ils apprennent à la connaître. Ensuite j'ai commencé à écrire, un petit peu à chaque fois, je ne savais pas encore ce que j'allais faire de tout ça. Le temps a passé et je me suis dit que j'imprimerais le document pour mon père, Jonathan et David, qu'un jour on le lirait à nos enfants. L'écriture ne s'est pas faite sans douleur, j'ai beaucoup pleuré en écrivant mais j'ai souri également voire carrément explosé de rire! J'ai continué et continué. J'ai beaucoup appris sur moi même, sur ma mère, sur notre relation. J'ai encore continué d'écrire jusqu'au jour où je me suis dit voilà c'est bon, j'ai obtenu ce que je souhaitais, un bel hommage à ma mère.
En le montrant à Jérémie, mon mari, je voulais qu'il me conseille sur la façon de le faire imprimer et je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il me dise que j'ai écrit un livre!
Pour moi c'était juste quelques pages, quelques souvenirs. Il m'a aidé à ouvrir les yeux, m'a convaincu que c'était un livre et que pour cela on allait tout faire pour le faire imprimer correctement. Il a beaucoup travaillé la mise en page, il s'est entretenu avec une imprimerie, il est allé jusqu'à Haïfa et il m'a ramené 4 exemplaires de mon travail. Un pour mon père, un pour mon frère Jonathan, un pour mon frère David et un pour moi. Si j'ai écrit tout cela c'est pour eux, pour nous. C'est ma vision de ma mère, c'est très intime, très personnel et surtout comme toute histoire c'est très subjectif. Je vous partage ici quelques photos car je suis fière. J'ai été jusqu'au bout, j'ai travaillé un nombre incalculable d'heures sans m'arrêter sur les difficultés, que ce soit d'écriture ou même logistique. Je suis seule la plupart du temps avec 3 enfants dont mon dernier qui était un nourrisson lorsque je me suis véritablement attelée à la tâche. Malgré la fatigue et malgré le Corona qui a fait que j'ai dû me transformer comme tant d'autres parents en professeur j'ai continué d'écrire. Je ne me suis pas cachée, pas voilée la face, j'ai extrait de moi cette relation compliquée et parfois exténuante que nous avions ma mère et moi. J'ai beaucoup travaillé sur moi, sur mes erreurs, j'ai compris comment m'améliorer dans ma relation à l'Autre et surtout dans ma relation avec moi même.
Ce livre aurait rendu ma mère folle de joie et d'autosuffisance. Elle m'a toujours dit que je devais écrire un livre et je lui répondais "oui un jour peut être" en pensant intérieurement "non mais sur quoi elle veut que j'écrive? Et ça demande beaucoup trop de travail". Qui aurait pu penser que sa mort serait l'élément déclencheur qui manquait pour ce projet? "Ah tu vois je te l'avais bien dit ma fille! tu devrais m'écouter plus souvent". Voilà maman tu avais raison, j'aurais juste préféré que tu sois là à mes côtés pour pouvoir me le dire en face, je t'aurais répondu avec mon sourire ironique que tu aimais tant et mon soupir exaspéré mais amusé "oui maman tu avais raison".
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